Enjeux épidémiologiques
En France, plus de 15 % des salariés travaillent de nuit (soit 3,5 millions de travailleurs). Les chiffres pour les travailleurs de nuits non-salariés et les travailleurs postés sont moins précis, mais atteignent probablement plus de 4 millions de travailleurs.
Définition du travail de nuit et du travail posté
- Travail de nuit (article L. 3122-29 du Code du travail) : on appelle travail de nuit tout travail accompli entre 21 heures et 6 heures.
Dans ce cadre réglementaire, est considéré comme travailleur de nuit :- Celui pour qui l’horaire de travail habituel comprend au moins 3 heures dans la période considérée comme travail de nuit (soit 21 h/6 h), et ce, au moins 2 fois par semaine ;
- Celui qui réalise un nombre minimal d’heures de nuit sur une période de référence, établie par accord ou convention. À défaut d’accord, le nombre minimal d’heures à accomplir est de 270 heures pour une période de 12 mois consécutifs (art. L. 3122-31et R. 3122-8 du Code du travail).
- Travail posté (directive européenne 93/104/CE, complétée par la directive 2003/88/CE): on appelle travail posté tout mode d’organisation du travail en équipe selon lequel des travailleurs occupent successivement sur les mêmes postes de travail, selon un certain rythme de type 3 × 8 (8 h de nuit, 8 h de matin, 8 h d’après-midi), y compris le rythme rotatif, et qui peut être de type continu ou discontinu, entraînant pour les travailleurs la nécessité d’accomplir leur tâche à des périodes différentes de 24 heures selon les jours ou les semaines de travail.

Conséquence du travail de nuit et posté
Le travail de nuit et posté perturbe les rythmes circadiens et entraîne une désynchronisation de l’horloge biologique endogène et une insuffisance chronique de sommeil (en moyenne 1 h de sommeil en moins que les travailleurs de jours) qui peut avoir des répercussions sur le comportement veille-sommeil et sur la régulation physiologique
globale de l’organisme et entraîner un risque pour la santé.
- Conséquences sur le comportement veille-sommeil
- Insuffisance chronique de sommeil,
- Plainte d’hypersomnolence et risque accidentel : en conduite automobile (sur trajet de retour de travail notamment) et accidents de travail,
- Plainte d’insomnie.
- Cancer : le travail de nuit et posté est « probablement cancérigène ». Le risque est avéré pour le cancer du sein chez la femme et le cancer de la prostate chez l’homme.
- Risque cardiovasculaire et métabolique
- risque avéré de syndrome métabolique,
- risque probable d’obésité, de diabète de type 2 et de maladies athéromateuses.
- Grossesse : risque augmenté d’avortement spontané, d’accouchement prématuré et de retard de croissance intra-utérin.
- Risque psychiatrique : probable risque d’augmentation de trouble dépressif et trouble anxieux.
- Syndrome de désadaptation au travail en horaires décalés ou de nuit : plaintes d’insomnie et/ou d’hypersomnolence avec répercussions fonctionnelles, accompagnées d’une réduction du temps total de sommeil en lien avec les horaires de travail récurrents.
Agenda du sommeil d’un travailleur posté,
adapté au niveau du sommeil

Surveillance des travailleurs de nuit et postés
Cadre médico-légal
En médecine du travail, selon l’article L. 3122-42 du Code du travail, la surveillance médicale des travailleurs de nuit est à l’appréciation du médecin du travail depuis 2017. Il est recommandé une surveillance annuelle. Les travailleurs de nuit doivent être informés des risques spécifiques lors de l’embauche et des surveillances.
L’article L. 122-25-1-1 stipule que les salariées enceintes ou venant d’accoucher bénéficient de mesures protectrices : à leur demande ou à la demande écrite du médecin du travail, elles seront affectées à un poste de jour pendant la durée de leur grossesse notamment, sans diminution de leur rémunération.
Surveillance par la médecine du travail
- Somnologique : par échelle de sévérité de la somnolence et agenda du sommeil.
- Cardio-métabolique : surveillance TA, tour de taille, IMC, bilan lipidique, glycémie standard.
- Cancer : surveillance du dépistage régulier et du suivi gynécologique/urologique.
- Grossesse : éviter le travail de nuit ou posté à partir de la 12e semaine d’aménorrhée
- Psychiatrique : surveillance.
Les rôles des médecins
- Médecin généraliste ou médecin du sommeil : informer
Les travailleurs de nuit et posté doivent être informés des risques et des mesures de prévention. - Médecine du travail : Informer des risques et évaluer le risque au poste de travail
Conseil à l’employeur des rotations dans le sens horaire, d’éviter les rythmes de rotation rapide, de favoriser l’exposition à la lumière en début de poste.